Comprendre les enjeux de l'agriculture

Le développement de la polyculture élevage à l’échelle d’un territoire devient envisageable. Des céréaliers cultiveraient des prairies pour vendre l’herbe à des éleveurs. En retour, ces derniers valoriseraient une partie des effluents de leurs animaux en les épandant sur les terres de leurs voisins. A la condition que la flore implantée soit adaptée aux conditions pédoclimatiques des exploitations.

La spécialisation des exploitations agricoles dans les céréales ou en productions animales, ne rend pas impossible la polyculture élevage. Mais elle devrait alors se développer à l’échelle d’un petit territoire en associant un bassin dédié à la production de céréales à un autre spécialisé dans l’élevage.

Les agriculteurs et les éleveurs bénéficieraient ainsi des atouts de cette pratique: les premiers introduiraient dans leur assolement la culture d’herbe qu’ils vendraient à des éleveurs. Et en retour, ces derniers valoriseraient une partie des effluents de leur troupeau en les épandant sur les terres de leurs collègues céréaliers.  Les céréaliers, dont le sol serait ainsi enrichi en matière organique, réduiraient ainsi leurs achats et épandages de fertilisants.

Par ailleurs, la culture d’herbe limitera le développement des adventices lorsque les parcelles seront de nouveau dédiées à la culture de céréales. Enfin, le fourrage récolté et distribué aux animaux rend inutile l’emploi de compléments alimentaires à base de céréales et de protéagineux, si la composition variétale des prairies fauchées associe des légumineuses et des graminées.

Composer la flore d’une prairie à la carte

En collaborant ensemble, les agriculteurs et les éleveurs bénéficieront au maximum des atouts de la culture d’herbe cultivée. Mais la flore implantée doit être adaptée aux conditions pédoclimatiques des exploitations.

L’essor des nouvelles technologies offre justement des champs d’application inimaginables il y a encore 20 ans. Il est dorénavant possible de composer, à la carte, la flore d’une prairie en fonction des attentes des agriculteurs et des éleveurs.

En France, l’Institut national de recherche agronomique (Inra) a  évalué et quantifié, pour chacune des plantes susceptibles d’entrer dans la composition d’une prairie, la quinzaine de fonctions qu’elles entretiennent avec leur environnement : photosynthèse, besoin en eau, concentration en CO2 de l’air, température etc. Pour parvenir à ces conclusions, les plantes ont été cultivées sur des micro-parcelles expérimentales. C’est en identifiant alors les fonctions de chacune de ces plantes, que les chercheurs sont parvenus à mettre au point les associations  de végétaux les plus adaptées à leur milieu pour résister, par exemple, à des températures élevées pendant plusieurs semaines.

La sélection porte aussi sur la capacité des végétaux de faire face à un déficit hydrique en période estivale ou encore, à résister à l’asphyxie racinaire dans des sols hydromorphes (rétention d’eau importante) en hiver.

Le mode de réponse morphologique des plantes à la qualité de la lumière est la seule fonction qui n’est pas encore bien comprise. Elle est déterminée à un stade précoce : au sol, le tallage des graminées dépend de la densité des plantes levées. Mais la localisation, dans la plante, des capteurs de la lumière solaire n’est pas bien cernée.

Or, sur un espace donné, les plantes souffrent plus de la compétition qu’elles se livrent entre-elles que du manque d’eau ou de lumière. En croissant à des rythmes différents, celles qui sont privées de lumière disparaissent en laissant la place à celles qui se développent plus rapidement.

Sélectionner des variétés adaptées à des températures plus élevées

Le changement climatique se traduira surtout, dans les régions tempérées, par une répartition différente des ressources disponibles en eau et non pas par des déficits pluviométriques plus importants. Les plantes vont devoir s’adapter à un environnement différent. Il conditionnera leur morphologie et les rendements des cultures.

Les nouvelles interactions entre la température, l’eau et la concentration de CO2, impacteront alors la croissance des végétaux, leur morphologie et par conséquent la population des prairies.

Le changement climatique soumet le monde de la recherche agronomique à de nouveaux défis. Des essais de culture de prairies sont  réalisés dans des milieux artificiels reconstitués, aussi proches que possibles des conditions dans lesquelles elles pousseront dans 20-30 ans. On pourra, ainsi, sélectionner de nouvelles variétés prairiales.

En fait, la recherche variétale accélère la sélection naturelle des végétaux. De nos jours, les « semences paysannes » permettent de produire des plantes adaptées à un milieu donné. Mais l’évolution des espèces est plus lente que le rythme de changement du climat. Ces espèces sont condamnées à disparaître si elles n’évoluent pas au rythme du changement climatique.

Frédéric Hénin