Comprendre les enjeux de l'agriculture

Au Japon, 200 fermes maraîchères verticales produisent des milliers de tonnes de légumes chaque année dans des tours d’une dizaine d’étages. De nombreux projets de construction de tours maraîchères sont programmés dans le monde, en Chine notamment. L’agriculture verticale est une technique consistant à cultiver les légumes en piles verticales en utilisant l’hydroponie et l’aéroponie pour fournir eau et nutriments  aux plantes . Bien qu’en expansion rapide, cette technique vieille de 10 ans, n’a pas encore trouvé la voie de la rentabilité financière.

En Ile de France, à Romainville, une exploitation maraîchère sera créée dans un  bâtiment en verre. Selon le site internet de la marie (1), ce projet au service de l’économie sociale et solidaire, créateur d’emplois, produira des légumes et des fruits en adoptant des pratiques agricoles durables.

En Asie, les tours maraîchères font complètement partie du paysage économique des métropoles où elles sont édifiées. Les auteurs de l’étude du ministère de l’Agriculture intitulée  « Les fermes maraîchères verticles » en dénombraient 200 en fonctionnement au Japon en 2017, « quatre cents dans le monde et autant de projets en cours de développement, en phase de prototypage ou liés à la recherche et à l’enseignement ». La Chine, qui en possède une dizaine, construit actuellement 160 nouvelles tours maraîchères.

Des performances cent fois supérieures à celles de l’agriculture conventionnelle

Les performances annoncées sont toujours spectaculaires. Des millions de plants de légumes poussent à tous les étages de ces tours, aménagées en serre, et éclairées le plus souvent par des ampoules Led. Rapportée au mètre carré construit, la production de salades dans une tour de 10 étages est jusqu’à plus de cinquante fois plus importante qu’en production maraîchère conventionnelle. En effet, en agriculture conventionnelle seules deux ou trois récoltes de salades par mètre carré sont possibles.

Ces exploitations maraîchères sont des concentrés de technologies « dernier cri ». Une fois testées, ces innovations technologiques sont appliquées dans  les systèmes de production plus conventionnels conduits en pleine terre.

La construction des tours mobilise d’importants moyens financiers. De grands groupes japonais créent des filiales pour financer la construction de ces fermes. Près de 14 millions d’euros ont été nécessaires pour édifier l’usine Kameola de Spread « pour une emprise au sol de 2 868 m2 soit 4 485 €/m2 au sol ». Aussi, les constructeurs de fermes verticales tentent de standardiser leur conception en réalisant des économies d’échelle pour réduire les coûts de construction.

Il faut, au minimum, $ 280 000 pour démarrer l’exploitation d’une petite ferme verticale en employant la technologie actuelle. Mais le coût d’installation d’une ferme de seconde génération – gestion informatisée, automatisation de la plantation et de la croissance des plants et de la récolte – peut dépasser les $ 15 millions.

Trois modèles économiques

A en croire  l’étude « Les fermes maraîchères verticales », on peut distinguer trois modèles économiques. Le modèle le plus fréquent regroupe les « fermes fordistes » (…) « où collaborent ingénieurs, contremaîtres et agents d’exécution ».

Le deuxième modèle, à l’instar  de la tour de Romainville par exemple, consiste à favoriser l’émergence de systèmes de production solidaires et collaboratifs inscrits dans l’économie circulaire. L’utilisation des ressources y est en effet limitée: faible surface au sol et optimisation de la consommation de nutriments, d’eau, de lumière et d’énergie etc. Mais la fabrication des ampoules Led pour éclairer les serres nécessite des terres rares extraites de mines exploitées en marge de toute considération environnementale. Pour certains experts agricoles encore, l’édification de ces fermes en zone urbaine limite la consommation de terres agricoles et maintient la biodiversité sur les terres qui ne sont pas ainsi artificialisées.

La multiplication de ces fermes standardisées, c’est le troisième modèle, pourrait conduire à la création de plateformes franchisées, réparties sur tous les territoires. De grands groupes économiques pourraient ainsi se constituer.

Quoi qu’il en soit, la production des cultures multi-étagées, en environnement confiné, n’est pas prête à remplacer l’agriculture conventionnelle en plein air et même sous serre. Au Japon, la production dans des fermes verticales ne représentait que 0,6 % de la production nationale en 2014 (dernier chiffre connu), selon l’étude «Les fermes maraîchères ».

Par ailleurs, seules des cultures à forte valeur ajoutée permettrait de rentabiliser  les capitaux investis. Le  marché représentait un chiffre d’affaires de $ 2,3 milliards en 2018 et les investissements ont fait un bond significatif de $ 60 millions en 2015 et 2016 à $ 414 millions en 2017 en 2017 et 2018.

Par exemple, la culture de plantes dans les tours maraîchères pourrait ne durer qu’une partie de leur cycle de croissance. Ces  pourraient être, ensuite,  réimplantées en pleine terre pour achever leur développement.

Frédéric Hénin