Comprendre les enjeux de l'agriculture

Quelles sont les initiatives en Afrique ?

Les pays africains reçoivent le soutien de toute une série de fonds bilatéraux et multilatéraux, notamment le Fonds de partenariat pour la réduction des émissions de carbone forestier, la REDD des Nations Unies, le FEM et le Programme d’investissement pour la forêt.

Les initiatives sont légion. Celle visant à remettre en état d’ici 2030 l’équivalent de 100 millions d’hectares de forêts et de terres agricoles devenues improductives en Afrique a été lancée en 2015 à Paris, en marge de la conférence climat (COP21), un objectif ambitieux. Le projet, soutenu par l’Union africaine, l’Allemagne et le World resources institute, baptisé African Forest Lanscape Restoration (AFR1000) associe dix pays, l’Ethiopie, la République démocratique du Congo, le Kenya, le Niger, l’Ouganda, le Burundi, le Rwanda, le LiberiaMadagascar, le Malawi, et le Togo.

L‘Initiative pour les forêts de l’Afrique centrale (CAFI), lancée également en 2015, vise à aider les gouvernements de la région à mettre en œuvre des réformes et à renforcer les investissements pour relever les défis tels que la pauvreté, l’insécurité alimentaire et le changement climatique qui exercent une pression sur les forêts tropicales. La CAFI est une collaboration entre le PNUD, la FAO, la Banque mondiale, six pays d’Afrique centrale et une coalition de donateurs, dont la Norvège, la France, l’Allemagne et le Royaume-Uni. Les six pays participants développeront des cadres d’investissement pour soutenir l’utilisation durable et la conservation de leurs ressources forestières, notamment par la mise en œuvre des activités REDD+ que nous présentons plus loin.

En avril 2018, L’initiative du Fonds bleu pour le Bassin du Congo, un projet lancé par le Congo pour protéger ce massif forestier de 220 millions d’hectares a fait l’objet d’un protocole d’accord. Il sera alimenté, selon les douze pays africains qui l’ont créé, sur la base des subventions renouvelables chaque année de 100 millions d’euros, avec des engagements à long terme.

Et les engagements européens ?

La question de l’empreinte spatiale de la déforestation doit être abordée au plan global. Il y a une interdépendance dans les responsabilités. Ainsi, estime-t-on que la déforestation tropicale est liée pour 10 % à la consommation en Europe. Ce constat est à l’origine d’une prise de conscience des menaces qui pèsent sur la biodiversité et a débouché sur des textes réglementaires. Entré en vigueur en 2013, le Règlement sur le bois de l’Union européenne (RBUE) impose aux acteurs de la filière d’être en capacité de justifier de l’origine des produits importés et de leur conformité aux normes légales en vigueur dans le pays d’origine. La mise en œuvre du RBUE suppose que soient clairement établies les dispositions légales existantes dans les pays producteurs ainsi que les modalités de leurs contrôles. Tel est l’objet du programme Forest Law for Enforcement, Governance and Trade (FLEGT) et son corollaire les Accords de Partenariat Volontaire (APV), c’est-à-dire des accords juridiquement contraignants afin de garantir que seul du bois d’origine légale sera importé dans l’UE. À travers ce programme, l’Union appuie les pays producteurs volontaires à définir un cadre de légalité s’appliquant au secteur forestier et les indicateurs de contrôle. La mise en œuvre de ce dispositif suppose, entre autres, que soit élaboré un système efficace de traçabilité des produits.

Forte de son patrimoine forestier, la France de son côté a développé une expertise reconnue dans le secteur. Ces capacités et expertises se déploient dans les pays africains d’intervention de l’Agence française de développement qui, en 2016, a engagé 337 millions d’euros en faveur de la biodiversité dont 23 % en direction de l’Afrique subsaharienne.

EN 2003, les prérogatives du Groupe National sur les Forêts Tropicales (GNFT) ont été étendues à la politique internationale de la France en matière de gestion durable des forêts tropicales humides. Ce mandat a donné lieu à la publication du « Livre Blanc sur les forêts tropicales humides » présentant des recommandations à destination de l’Etat, de l’aide publique au développement et du secteur privé. Lors d’une conférence en 2012 rassemblant l’ensemble des parties prenantes, le GNFT a produit le rapport « Forêt Tropicales : point d’étape et nouveaux défis, quelles orientations pour les acteurs français ? » afin de mettre à jour les positions des acteurs français sur les forêts tropicales et de dresser une nouvelle feuille de route sur les forêts tropicales.

La certification volontaire est-elle efficace ?

La certification fut lancée dans les années 1980 quand des ONG comme World Wildlife Fund, Greenpeace et les Amis de la terre voulurent capitaliser sur les succès du Sommet de Rio. Les promoteurs de la certification partent de l’idée selon laquelle des investissements consentis par des « entreprises vertueuses » dans les procédures d’aménagement durable et de bonne gestion des forêts sont compensés par des parts de marché accrues, là où les consommateurs sont en mesure d’accepter un prix plus élevé.

Prenons le cas du Ghana évoqué plus haut. L’action des ONG en faveur de la conservation a pris de l’importance avec l’idée de certification. Les principaux partenaires de la filière ont été consultés sur ce sujet délicat. Pour beaucoup d’entre eux, notamment pour les dix plus gros exploitants, la mise en place d’un système de certification va surtout servir à donner bonne conscience aux « riches Européens» toujours désireux de savoir d’où provient leur meuble de jardin en tek et qui a coupé l’arbre dont il est fait. Il est même question d’affecter un code-barres à chaque tronc, ce qui permettra de suivre leur destination à partir d’un satellite. Vient-il d’une coupe légale ? Est-il labellisé ” écologiquement correct” ? Le carbone restera-t-il séquestré ?

La certification est une démarche volontaire de l’exploitant. Il existe deux grands types de certification : la certification de légalité des bois et la certification de gestion durable. Pour cette dernière, le label FSC (Forest Stewardship Council) tend à s’imposer comme la référence. La composante aménagement de cette certification entre pour au moins 60 %. Sont parties prenantes à la certification les exploitants forestiers, les investisseurs, les écologues, les chasseurs, les entreprises vendant ou consommant de grandes quantités de bois et de papier. L’ambition de FSC est de couvrir 20 % du commerce forestier africain d’ici 2020.

On estime qu’un tiers des forêts mondiales dites de production sont certifiées « bonne gestion ». Mais seulement moins de 2 % des forêts tropicales mondiales le sont. Pour les plus optimistes, les choses devraient évoluer car l’industrie du bois s’y engage de manière croissante en Afrique centrale, tandis que les gouvernements qui y voyaient autrefois une ingérence et une concurrence mettent en avant les surfaces certifiées sur leur territoire pour améliorer leur réputation.

La certification ne présente pas que des avantages. Surtout lorsqu’elle n’est pas, dans les faits, respectée par tous les acteurs. Le groupe français Rougier qui exploite plus de 2 millions d’hectares de concessions forestières certifiées (Cameroun, Congo, Gabon et RCA), connu pour la qualité de ses aménagements, en a été victime. À côté de lui, ce sont d’autres acteurs européens du bois tropical qui sont fragilisés. Ils ont tous investi dans la certification FSC. Et pourtant ils voient leur débouché naturel se fermer en Europe. Les importateurs sont frileux depuis le Règlement sur le bois de l’Union européenne (RBUE) jugé très restrictif. L’Autrichien IFO au Congo, le néerlandais Wijma au Cameroun, l’Italien Cora Wood au Gabon, sont vendus aux Chinois. Ce sont les Asiatiques qui achètent aujourd’hui le bois tropical africain, et ils sont beaucoup moins regardants sur la légalité du bois. La vertu tue-t-elle ?

Une nouvelle approche dite High Carbon Stock (HCS) est développée par plusieurs ONG (Greenpeace, The Forest Trust notamment), qui estiment insuffisante l’approche par la certification. Elle consiste à identifier et à protéger les zones de forêts même dégradées présentant un intérêt en termes de stockage de carbone. Seules les zones extrêmement dégradées qui ne contiennent plus que de petits arbres, arbustes ou graminées, peuvent faire l’objet d’une mise en exploitation. Elle permet de protéger de 30 % à 40 % en moyenne d’une parcelle (contre 5 % dans le cadre de la certification classique par exemple) et est donc beaucoup plus exigeante. Les forêts HCS stockent une grande quantité de carbone qui serait dissipé dans l’atmosphère si elles étaient converties en plantations.

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