Comprendre les enjeux de l'agriculture

Le couvert forestier africain

Les réformes en matière de gouvernance forestières avancent, mais les efforts visant à conserver et à utiliser durablement les forêts sont encore fragmentés, insuffisantes et sous-financés. Pour que les forêts deviennent un levier d’action au service de la lutte contre le changement climatique et contre la pauvreté, elles doivent bénéficier d’un aménagement qui concilie valorisation économique et préoccupations environnementales et sociales. L’application des principes de la « gestion durable à but multiple », pourrait devenir l’approche qui porte les nouvelles politiques forestières des États africains.

Un phénomène aux causes multiples

Le processus de déforestation est un phénomène complexe, associé à trois types d’activités :

  1. D’abord les prélèvements de bois-énergie

Crédit photo, Banque mondiale

Au premier rang des consommateurs mondiaux de bois pour la cuisson et le chauffage dans le monde, l’Afrique consomme, selon la FAO (2015), 625 millions de m3 de bois-énergie par an, soit 90 % de sa consommation totale de bois. Avec la croissance démographique, la demande en bois-énergie en Afrique subsaharienne devrait augmenter considérablement. La collecte de bois de feu menace particulièrement les forêts en zones densément peuplées. En milieu rural, l’impact de la collecte de bois de chauffage est généralement compensé par la régénération des forêts naturelles ; il peut néanmoins devenir une sérieuse cause de dégradation des forêts et de déforestation lorsque la demande émane de marchés concentrés. La croissance urbaine moyenne est de 3 à 5 % par an, voire plus (5 à 8 % dans les grandes villes telles que Lagos, Dakar, Abidjan, Bamako, Kinshasa, Brazzaville, Libreville, ou Douala). Les bassins satisfaisant une demande urbaine croissante s’étendent au fil du temps et peuvent aller jusqu’à 200 kilomètres des centres urbains, provoquant ainsi, une dégradation progressive des forêts naturelles.

  1. Ensuite le défrichement

L’extension des terres agricoles, la culture itinérante et les cultures industrielles sont responsables de la disparition de 70 % des forêts denses des zones humides et de 60 % des forêts de la zone sèche. En milieu rural, le taux annuel de défrichement en forêt dense est fortement corrélé avec la densité de la population rurale. Les zones de transition entre la forêt tropicale et la savane, où les densités de population sont habituellement beaucoup plus élevées (jusqu’à 150 habitants au kilomètre carré) ont des taux de déforestation ou de dégradation des forêts importants.

  1. Enfin, l’exploitation d’essences forestières à des fins industrielles

Crédit photo, Babylone Mikongo

Une coupe peut être légale, assortie d’un plan d’aménagement forestier. Elle peut être illégale avec alors une tendance à la surexploitation lorsque les coupes sont trop nombreuses, lorsque les diamètres minimaux des troncs des grumes abattues ne sont pas respectés, ou lorsque les volumes exploités sont minorés. Il faut cependant ne pas exagérer l’importance de ce facteur en Afrique. L’exploitation forestière industrielle reste pratiquée de façon extensive dans la zone tropicale, avec environ 44 millions hectares de forêts sous concession (8.3 % de la surface totale des terres). Contrairement aux autres régions tropicales, où les activités d’exploitation forestière accompagnent généralement une transition vers une autre utilisation des terres, l’exploitation forestière dans le Bassin du Congo est plutôt sélective et les forêts de production restent encore en permanence boisées. Mais partout la route tue la forêt, progressivement, car elle permet l’entrée des prédateurs illégaux.

La coupe n’est pas le seul problème. La tendance que l’on retrouve fréquemment à remplacer la forêt primaire par des espèces de moindre qualité à croissance rapide, comme l’eucalyptus par exemple, contribue à la détérioration des forêts par perte de biodiversité ou par altération des services environnementaux. Beaucoup de ces essences à croissance rapide consomment de grandes quantités d’eau, ce qui modifie le cycle de l’eau et réduit la ressource disponible pour l’agriculture.

À côté des risques de la déforestation plus ou moins rapide selon les régions, les forêts africaines sont partout menacées par la dégradation générale de leurs écosystèmes. Le processus est généralisé. Même quand la surface globale du massif forestier demeure inchangée, on observe en effet une baisse de la qualité écologique du milieu, caractérisée par la dégradation de la capacité des écosystèmes à remplir leurs fonctions. Cette dégradation peut provenir de phénomènes naturels (incendie, sécheresse, inondation, glissement de terrain, tempête, maladie ou ravageurs) ou résulter des activités humaines comme celles que nous venons de citer ou d’autres (chasse, divagation du bétail, produits toxiques en marge d’une exploitation minière ou industrielle). Ces processus de dégradation sont plus difficiles à évaluer que ceux associés à la déforestation car il nécessite des observations au sol alors que la déforestation peut être observée à l’aide d’images satellitaires par exemple.

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