Comprendre les enjeux de l'agriculture

D’ici 2031, la production agricole en Afrique du Nord et au Moyen Orient progresserait de 1,6% par an. Mais la population croîtrait dans les mêmes proportions pour atteindre 50 millions d’habitants. Aussi le taux d’autosuffisance des principaux produits agricoles se maintiendra à son niveau de 2020.

Dans un document de plus de 400 pages, l’Organisation de coopération et de développement économique (OCDE) a publié « Perspectives agricoles de l’OCDE et de la FAO 2022-2031 ». Cet ouvrage dresse un panorama, continent par continent, de l’évolution de l’agriculture de notre planète à l’horizon de 2031.

En Afrique du Nord (1) et au Moyen Orient, la croissance démographique éloigne la perspective d’atteindre l’autosuffisance alimentaire à brève échéance. Au cours des dix prochaines années, la production agricole en Afrique du Nord et au Moyen Orient progresserait de 1,6% par an mais la population croîtrait dans les mêmes proportions. En 2031, on dénombrerait 500 millions d’habitants.

En conséquence, les soixante six millions de tonnes (Mt) de grains qui seraient récoltées en plus chaque année à l’horizon de 2031 permettraient d’assurer un taux d’autosuffisance alimentaire de 37,7 %, à peine supérieur de 0,5 point à celui observé 10 ans auparavant. `

Pour autant, 10 Mt de céréales en plus seraient produites d’ici 2031. Cette hausse reposerait sur une intensification des pratiques agricoles et sur des gains de productivité importants.

En effet, le rendement moyen des cultures de blé augmenterait de 0,8 % par an, celui du riz de 1,5 % par an et celui des légumineuses de 1,0 % par an.

Mais après 2031, les rendements du blé seront seulement équivalents à 78 % de la moyenne mondiale et ceux des autres céréales secondaires ne dépasseront pas 47 %.`

D’ici 2031, la production d’oléagineux progresserait aussi de 90 000 t pour atteindre 1,136 Mt par an. L’OCDE anticipe une récolte de racines et de tubercules en nette progression de 950 000 tonnes pour atteindre 4,87 t par an (+ 2Mt sur 20 ans).

L’essor de la production locale de racines et de tubercules témoigne la volonté des pays d’accroître leur taux d’autosuffisance alimentaire en privilégiant les productions locales. De nombreux travaux de recherche agronomique tentent de sélectionner des variétés locales plus productives, aptes à faire face au changement du climat.

 

Hausse de la consommation de viande

En Afrique du Nord et au Moyen Orient, la hausse de la production de viande proviendra principalement du secteur de la volaille, dont le taux de croissance (+ 3,1 % par an par rapport à la précédente décennie) devance de loin toutes les autres viandes.

Des progrès sont également attendus pour la viande bovine. La production augmentera de 1,6 % par an, après avoir été en baisse par le passé. Mais la production de viande ovine restera globalement stable d’ici 2031 et serait entièrement destinée au marché intérieur.

Comme la production agricole et les importations augmenteront au même rythme que la croissance démographique, la population ne disposera pas plus d’aliments de base (219,5 Kg/an) en 2031 qu’au cours de la précédente décennie. Mais la population consommera 25,7 kg de viande par habitant et par an, soit  +1,5 kg par rapport à 2018-2020. Autrement dit, l’Afrique du Nord et le Moyen Orient produiront et surtout importeront plus de viande en 2031 qu’en 2019-2020.

Toutefois  54 % des calories consommées au Moyen Orient proviendront encore des céréales en 2031, soit 10 points de plus que la moyenne mondiale. Et le sucre représentera 9 % de l’apport calorique total alors que la moyenne mondiale est de 7 %.

 

Echanges commerciaux

D’ici 2031, le déséquilibre persistant entre les importations et les exportations de produits agricoles se traduira par une augmentation de $25 milliards du déficit commercial au cours des dix prochaines années. Il atteindrait $99 milliards  en 2031.

Les exportations ($39 milliards par an) croitraient de près de $6 milliards mais les importations nécessaires pour compenser la production déficitaire en céréales, en viande et en produits laitiers, augmenteraient jusqu’à $31 milliards d’ici 2031 par an pour atteindre 138 milliards.

D’ici 2031, la valeur des importations de la région aura alors augmenté de 29 % par rapport à la période de référence.

L’Afrique du Nord et le Moyen Orient concentreront alors une grande partie du commerce mondial de produits agricoles. 26 % des exportations mondiales de blé seront expédiées en Afrique du Nord et au Moyen Orient.

Depuis le début du conflit entre l’Ukraine et la Russie, la dimension géopolitique de ces échanges commerciaux rend l’Afrique du Nord et le Moyen Orient très vulnérables. L’enjeu principal n’est pas seulement les prix d’achat des produits importés mais leur disponibilité.

  • Afrique du Nord : Mauritanie, Maroc, Algérie, Tunisie, Lybie, Egypte.

Les animaux d’élevage nourris par des aliments importés.

La croissance du secteur de l’élevage, en particulier celui de la volaille, entraînera une hausse de 20 % de l’utilisation des aliments pour animaux dans les dix ans à venir.

Or la majorité des aliments pour animaux est déjà importée. Les politiques agricoles menées en Afrique du Nord et au Moyen Orient ont toujours privilégié les cultures vivrières plutôt que les cultures fourragères, dans un environnement où le potentiel de production est très limité.

En 2031, des produits comme le maïs, l’orge et les tourteaux protéiques, achetés à des pays tiers, devraient représenter plus de 75 % du total de l’alimentation animale. Par exemple, 34 Mt par an de maïs seront importées d’ici 2031, soit 7 Mt de plus en dix ans.