Comprendre les enjeux de l'agriculture

370 millions de tonnes de céréales (maïs, blé et orge essentiellement) seront exportés dans le monde durant la campagne 2019-2020. Neuf pays et l’Union européenne dominent le marché. Les Etats-Unis, leaders des pays exportateurs, perdent chaque année des parts de marché. L’Argentine, deuxième puissance exportatrice mondiale de grains depuis deux ans, a fait reculer la Russie et l’Ukraine aux troisième et quatrième places tandis que l’Union européenne, en cinquième position, fait quasiment jeu égal avec le Brésil.

Le commerce mondial des céréales (hors riz) s’est stabilisé depuis trois ans. Selon le Conseil international des céréales (CIC),  370 millions de tonnes (Mt) de grains (essentiellement du blé, de l’orge et du maïs) sont disponibles à l’exportation durant la campagne 2019-2020, soit 17,7 % de la production mondiale de céréales. Les quantités supplémentaires ( 18 Mt) de grains qui seront produites d’ici juillet 2020 seront toutes exportées, améliorant ainsi la sécurité alimentaire des pays importateurs.

Huit pays  – les Etats-Unis,  la Russie,  l’Ukraine, l’Argentine, Brésil, Kazakhstan, Australie et  Canada)- et l’Union européennes se partagent 85 % des quantités de céréales vendues dans le monde (environ 354 Mt). L’Inde et la Chine, les deux principaux pays producteurs de céréales dans le monde, sont « des nains commerciaux » à l’échelle de la planète, aussi bien à l’export qu’à l’import. Ils récolteront 458 Mt de grains (hors riz) tout au long de l’actuelle campagne céréalière mais exporteront à peine 2 Mt.

En fait, la Chine et l’Inde produisent avant tout des céréales pour nourrir leur population. Les importations de grains sont marginales comparées aux quantités produites même si elles portent en Chine sur des volumes significatifs (15,6 Mt de grains).

Les Etats-Unis font la course en tête

Le commerce mondial de céréales équivaut à 21 % de la production mondiale. Parmi les pays exportateurs de céréales, les Etats-Unis sont en tête. Ils expédieront cette année 81Mt de grains, soit 22 % des ventes mondiales. Mais ils avaient vendu 92 Mt trois ans auparavant.

La nouvelle campagne 2019-2020 confirme l’ascension commerciale de l’Argentine sur la scène mondiale. Elle est devenue le deuxième pays exportateur de grains (50 Mt seront vendues pour la seconde campagne consécutive). En écoulant 11 à 12 Mt par ans de plus depuis 2017, l’Argentine a détrôné la Russie et l’Ukraine, rétrogradées à la troisième et à la quatrième place des pays exportateurs majeurs de grains.

Situé dans l’hémisphère sud, l’Argentine écoule en effet chaque année  ses céréales durant la seconde partie de la campagne céréalière, au début de l’été austral, à partir des mois de décembre et de janvier, ce qui la protège relativement de la concurrence de la Russie et de l’Ukraine.

Dans le bassin de la Mer Noire, l’Ukraine (48 Mt) et la Russie (44 Mt) font quasiment jeu égal. La Russie vend essentiellement du blé et de l’orge tandis que l’Ukraine expédie surtout du maïs (24,5 Mt).

Les autres pays exportateurs majeurs de céréales écouleront quasiment les mêmes volumes de grains que la campagne passée. L’Union européenne, cinquième puissance exportatrice, vendra 36 Mt de grains durant la campagne 2019-2020. Elle est suivie par le Canada (31 Mt) et l’Australie (20 Mt) qui se remet difficilement d’un des plus terribles épisodes de sécheresse de son histoire.

Spécialisation des pays exportateurs

Enfin, les marchés mondiaux peuvent compter tous les ans sur les  9 à 10 Mt de grains (essentiellement du blé) récoltées au Kazakhstan. Le pays profite commercialement de sa situation géopolitique. Il est à la fois aux portes du bassin de la Mer Noire, du Moyen Orient (via la mer Caspienne) et de la Chine avec laquelle il partage une frontière commune.

Les neuf puissances exportatrices de céréales référencées par le CIC n’occupent pas toutes un rôle majeur sur chacun des marchés céréaliers qu’elles approvisionnent. La Russie est la première puissance agricole exportatrice de blé (34,7 Mt en 2019-2020) et les Etats-Unis sont en tête des pays exportateurs de maïs (52 Mt). Mais c’est l’Union européenne qui vendra encore, cette année, le plus d’orge dans le monde (9 Mt).

Blé, un marché de 174 Mt

Sur les 768 Mt de blé produits dans le monde, 174 Mt (22%) seront exportés durant la campagne 2019-2020, selon le CIC. Toutefois, 94 % du commerce mondial est assuré par 7 pays producteurs et par l’Union européenne. Ensemble, ces huit producteurs écouleront 162 Mt (+ 5 Mt sur un an), soit 40 % de leur récolte (378 Mt). Ils réaliseront ainsi 95 % des transactions commerciales mondiales (171 Mt).

Durant la campagne actuelle 2019-2020, la Russie restera le premier pays exportateur de blé (36 Mt) même si le pays ne renouvelle pas l’exploit réalisé trois ans auparavant. En produisant  85 Mt, elle avait alors vendu 41 Mt durant la campagne 2017-2018.

L’effondrement de l’URSS  n’a en rien modifié la liste des pays anciennement communistes producteurs de blé : Russie, Ukraine et Kazakhstan tous trois riverains de la Mer Noire, encore appelés pays RUK. Ils sont retournés sur le marché mondial du blé dans les années 2000, après plus de quatre-vingt ans d’absence.

Les Etats-Unis, l’Union européenne et le Canada sont au coude à coude sur le marché du blé. Les trois puissances céréalières ambitionnent d’écouler entre 24 et 25 Mt chacune d’ici fin juin 2020. L’Union européenne retrouve cette année un niveau de production conforme aux campagnes précédentes (148,7 Mt selon le CIC) après une forte baisse l’an passé. La France ayant récolté 39 Mt, dopera cette année les ventes européennes (25 Mt environ).
L’Ukraine projette d’expédier 17,5 Mt. Dans l’hémisphère sud, l’Australie et l’Argentine exporteront 14 Mt chacune environ. Enfin, le huitième pays exportateur mondial, le Kazakhstan, expédiera 8 Mt.

Maïs, cinq pays se partagent un marché de 163 Mt

Le maïs est avant tout cultivé pour alimenter le marché intérieur des pays producteurs. La Chine, deuxième producteur mondial (254 Mt) après les Etats-Unis (333 Mt), croule sous ses stocks (176 Mt).

A l’export, cinq pays se partagent un marché mondial de 163 Mt. Le Brésil et l’Afrique du Sud font partie du cartel des pays exportateurs. La Russie, le Kazakhstan et l’Australie en sont absents. Quant à l’Union européenne, elle rejoint le Japon, en têtes des pays importateurs de grains.

Les Etats-Unis sont le premier pays exportateur mondial de maïs (52 Mt vendus en 2018) mais leurs ventes ont diminué de 10 Mt en trois campagnes. Le Brésil occupe la deuxième place (37 Mt). L’Argentine fait un bond spectaculaire en commercialisant chaque année jusqu’à 34 Mt (+ 9 à 11 Mt en trois campagnes). En expédiant 24 Mt, l’Ukraine est le quatrième pays exportateur majeur de grains, loin devant l’Afrique du sud (2 Mt).

Orges, six pays se partagent un marché de 27 Mt

La production mondiale record d’orge fourragère et de brasserie (150 Mt) en 2019-2020 ne va pas doper le commerce mondial de cette céréale. Cinq pays et l’Union européenne se partagent le marché de l’orge. Ils exporteront 27 Mt sur les 111 Mt qu’ils ont récoltés.  Un quart de la production mondiale d’orge sera exclusivement consommé par les autres pays producteurs de la planète.

L’Union européenne est le premier producteur (60 Mt) et exportateur (9 Mt) mondial d’orges fourragères et de brasserie. L’Australie, la Russie et l’Ukraine vendront environ 5 Mt de grains chacune d’ici fin juin 2020.

Les capacités d’exportation du Canada et de l’Argentine sont estimées à 3 Mt chacun. Leur principal client est l’Arabie saoudite, le premier pays importateur mondial dorge (8 Mt).

Un tiers du commerce de l’orge se déroule durant la seconde partie de la campagne, lors de l’été austral. 8 Mt sont alors échangées.

Seigle et avoine, des marchés régionalisés

L’Union européenne est le premier producteur de seigle et d’avoine (16 Mt sur les 38 Mt récoltés à l’échelle mondiale). Mais leurs productions sont autoconsommées et les échanges commerciaux des vingt-huit pays membres sont intra-communautaires. Le Canada est le seul pays producteur de la planète qui exporte une grande partie de l’avoine récoltée vers des pays tiers : 2,4 Mt sur les 3,9 Mt produits.

Frédéric Hénin

A voir en vidéo : Le marché du blé en 2019 par Agritel