Les startups de l’édition génétique agricole ont collecté plus de $ 2,7 milliards depuis 2012. Puis, le secteur a connu une période de somnolence depuis 2017 et l’épidémie du Covid. On assiste depuis le début de cette année à une reprise fulgurante des investissements.
Les startups spécialisées dans l’édition de gènes agricoles ont levé plus de 161 millions de dollars au cours des six premiers mois de 2024, soit une augmentation de 206% par rapport à la même période en 2023. Ce regain d’intérêt s’explique notamment par des avancées technologiques récentes qui ont permis d’en accroître la précision, d’en réduire les coûts de recherche et d’en élargir les horizons.
Citons parmi les avancées scientifiques les plus récentes la technolgie de « boosted breeding » de la société Ohalo Genetics ou encore la technologie GEiGS (gene editing-induced gene silencing). La première innovation consiste à déployer des protéines pour désactiver efficacement le mécanisme de division des gènes chez chaque parent. La seconde innovation consiste à utiliser l’interférence ARN pour lutter contre une série de maladies et de pathogènes dans les cultures.
L’édition génomique contribue à restructurer le secteur agricole en permettant de mettre au point de nouvelles variétés de culture plus performantes, plus résistantes aux parasites et à la sécheresse et plus résilientes dans les environnements hostiles comme la culture du riz dans les eaux salées. Enfin l’édition génétique peut augmenter le rendement et la qualité des cultures.
L’édition de gènes présente également un avantage réglementaire majeur en permettant aux semenciers des méthodes qui améliorent les cultures vivrières sans déclencher la classification OGM (organisme génétiquement modifié) par l’USDA (ministère américain de l’Agriculture) car elle n’introduit pas de matériel génétique étranger dans l’ADN d’une culture. Mais, actuellement, l’Union européenne est beaucoup mois souple en matière de réglementation de l’édition de gènes. Elle classe toujours les gènes édités dans la catégorie des produits génétiquement modifiés.
Cela explique, en partie, l’écrasante domination des Amériques avec des levées de fonds de $ 2,23 milliards (81,9% du total mondial). Viennent ensuite l’Asie $354 millions (13%) et l’Europe avec seulement $ 136,69 millions (5%).
Malgré leurs réticences réglementaires, les institutions européennes reconnaissent l’importance de cette technologie et la soutiennent par diverses subventions et contributions. En juillet, le projet Ancient Environmental Genomics Initiative for sustainbility (AEGIS) a reçu $ 85 millions dont 72 de la fondation danoise à but non lucratif Novo Nordisk et le reste de Welcome Trust un organisme caritatif anglais. Ce projet a pour objectif ambitieux de cartographier l’ensemble du génome planétaire à l’aide de fragments d’ADN de plusieurs milliers d’années et de dresser ainsi une carte génomique de l’évolution de la biodiversité sur notre planète. Ce type de banque de données pourrait servir de base pour le développement de nouvelles variétés reposant sur des informations évolutives.
Si l’on examine de plus près les levées de fonds dans la première moitié de 2024, on constate que trois entreprises américaines se taillent la part du lion : Inari ($103 millions), Ohalo Genetics ($ 40 millions) et BioConsortia ($15 millions).
Quelle est la différence entre produits génétiquement édités et OGM ?
Les produits génétiquement édités et les organismes génétiquement modifiés (OGM) se réfèrent tous deux à des techniques de modification génétique, mais ils diffèrent par leur approche et leurs implications.
Le terme OGM désigne tout organisme dont le matériel génétique a été modifié d’une manière qui ne se produit pas naturellement par reproduction ou recombinaison. Cela inclut l’introduction de gènes provenant d’autres espèces, ce qui est souvent réalisé par des techniques comme la transgénèse.
Les produits génétiquement édités : l’expression fait référence à des techniques plus récentes, comme CRISPR/Cas9, qui permettent de modifier les gènes de manière plus ciblée et précise. Ces techniques peuvent impliquer des modifications naturelles (comme des insertions, suppressions ou substitutions de séquences d’ADN) sans nécessairement introduire de gènes étrangers.
- Différences du point de vue des méthodes :
OGM: Les méthodes traditionnelles peuvent inclure l’insertion de gènes venant d’autres organismes, ce qui entraîne souvent des modifications plus larges du génome. Par exemple, une plante pourrait recevoir un gène de résistance à un herbicide provenant d’une bactérie.
Produits génétiquement édités : Les technologies d’édition génomique permettent de modifier le génome existant d’un organisme sans ajouter de gènes étrangers. Cela peut inclure la correction d’une mutation ou l’amélioration d’un trait spécifique, comme la résistance aux maladies ou l’augmentation du rendement.
- Implications réglementaires :
OGM : Dans de nombreux pays, les OGM sont soumis à des réglementations strictes en matière d’évaluation de la sécurité et d’étiquetage avant d’être commercialisés.
Produits génétiquement édités : La réglementation des produits issus de l’édition génomique varie. Dans certains pays, ces produits peuvent être considérés comme non-OGM si la modification peut également se produire par des moyens naturels, ce qui entraîne des discussions sur leur évaluation et leur étiquetage.
- Acceptabilité :
OGM : Les OGM rencontrent souvent une opposition en raison de préoccupations liées à la sécurité alimentaire, à l’impact sur l’environnement et à des questions éthiques.
Produits génétiquement édités : L’édition génomique est parfois perçue comme moins controversée car elle peut imiter des processus naturels et conduire à des modifications sans éléments étrangers, mais elle n’est pas exempte de critiques.