Comprendre les enjeux de l'agriculture
Des innovations de rupture

L’Afrique offre aujourd’hui un terreau fertile d’opportunités. L’absence d’héritage en équipements électriques trop rigides ouvre la voie à la flexibilité des options. Dans ce contexte, trois « innovations disruptives» peuvent influencer les arbitrages techniques futurs et probablement faire système en matière d’organisation. Elles sont déjà en œuvre sur le terrain.

  • D’abord, la chute continue des prix des panneaux photovoltaïques (dont les prix ont été divisés par 8 entre 2010 et 2017) et des batteries qui en outre sont de plus en plus fiables, accentue nettement l’avantage comparatif du solaire par rapport à d’autres options, dont évidemment le diésel.
  • Dans le même temps, la numérisation des dispositifs de type mini-réseaux permet d’optimiser la gestion de l’équipement en résolvant quasi instantanément l’équation combinant d’un côté l’intermittence du solaire (ou de l’éolien) et de l’autre la variabilité de la demande (nocturne/diurne), la batterie ne servant que comme simple appoint pour ajuster à tout moment  l’offre et la demande. Des technologies (Ecoisme, Rachio, Ecobee, Tado) permettent d’économiser de l’énergie en suivant la consommation de tout appareil et donner des conseils afin de diminuer les consommations.
  • Enfin, les innovations en matière de paiement, attachée en particulier à la diffusion des moyens mobile, améliorent l’accessibilité du service et permettent d’instaurer des modèles économiques également innovants.

D’aucuns pensent que l’Afrique est désormais la source de vagues d’innovations qui pourraient par la suite se diffuser, également dans les pays du Nord.

2. Trois modèles d’organisation adaptées au contexte

L’accès à l’électricité ne se résume pas à des lampes, des générateurs et des câbles. Il suppose une organisation. Les systèmes de mini et micro-réseaux diffèrent dans leur modèle d’organisation selon plusieurs facteurs : leur taille, la technologie mise en œuvre, la demande, le contexte social. Notre analyse permet d’identifier trois modèles principaux qui chacun à leur manière répondent à la quadruple question : qui peut faire quoi ? Avec qui ? Sous quelles contraintes ? Avec quelles opportunités ?

Le modèle du comité collectif de gestion (CCG)

Le plus simple des modèles. Il est pertinent quand la communauté est homogène, sans hiérarchie trop pesante, avec un capital social élevé et un mode de gestion qu’elle s’invente assez naturellement sur le modèle des Communs. On retrouve le cas mauritanien des plateformes multifonctionnelles. L’installation est « à taille humaine » et la gestion par un système de délégation de l’Etat à un artisan-gérant est pragmatique. La gestion coopérative responsabilise les usagers en faisant de l’équipement un bien à préserver. Dans les faits, ce modèle de « primo-Commun » où les acteurs ne voient pas (encore) leurs décisions commandées par des logiques du marché ne se rencontre que dans les petites communautés, avec une organisation de type « comité d’usagers», permettant notamment de favoriser la participation des femmes.

Le modèle du petit opérateur d’énergie (POE)

Il se rencontre par exemple dans le cas du Mali. Il est, quant à lui, le plus répandu dans les mini-réseaux. Il correspond parfois à une évolution du précédent modèle. Il se rapproche d’un système mixte de gestion d’une ressource commune où le marché organise progressivement les critères de choix et induira inéluctablement le passage à la propriété. Ici le choix de l’opérateur est critique car il doit servir les fins collectives poursuivies. Il s’agit d’une affaire délicate, puisque c’est lui qui garantit la régularité du service, qui veille à la maintenance des équipements, collecte les redevances, assure le lien avec les abonnés et les institutions extérieures. Autant de tâches générant des coûts opérationnels d’adaptation pour l’opérateur, avec une part de risques. Pour inscrire la gestion du mini-réseau dans la durée, les relations entre le POE et les usagers sont pratiquement toujours formalisées : contrats d’abonnement, obligations de rapports financiers réguliers. L’expérience montre que les exploitants choisis sont le plus souvent proches de la communauté servie ce qui facilite l’instauration d’un climat de confiance autour d’une « propriété partagée ». Le temps entre l’incubation et la maturité, c’est-à-dire la garantie de la pérennité avec un financement autonome, pour un exploitant local est rarement estimé à moins de 5-7 ans. Face aux risques, il sont logiquement contraints pour assurer la rentabilité du site qui leur est confié à innover en permanence avec des options hybrides, en gérant l’intermittence jour/nuit de la ressource solaire, en partageant la production sur plusieurs activités, en démultipliant les offres de services rendues (cas type du cybercafé). De ce point de vue, le partage d’expériences et le parangonnage sur les bonnes pratiques se révèle presque partout indispensable. Ils sont en général menés par des ONG d’appui.

 

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